« Viet Nam-L'histoire politique des deux guerres – Guerre d'indépendance (1858-2954) et Guerre idéologique ou Nord-Sud (1945-1975) » de Nguyen Ngoc Chau, préfacé par Pierre Brocheux, 2020
Encore un livre sur les guerres du Viet Nam ? Beaucoup a été écrit sur elles, et par les plus prestigieux historiens. Que va nous apporter ce nouveau document écrit par surcroît par un non spécialiste ?
L’auteur l’a précisé, il voulait retransmettre à ceux qui sont intéressés par le Viet Nam et en particulier aux nouvelles générations issues de Vietnamiens établis hors de leur pays la connaissance de l’histoire passée, en essayant d’y intégrer le plus possible ce qu’il avait pu découvrir de plus de 150 documents et autres sources en Français, en Anglais et en Vietnamien. L’histoire reracontée n’est pas toujours complète, des parties ne s’y trouvent pas, parce que le sujet ne s’ y prête pas, ou par omission volontaire, par ignorance ou par méconnaissance. Et l’histoire de son pays présentée par un Vietnamien avec son cœur ne pouvait qu’être original.
Le livre se présente sous la forme d’un fresque, d’ une succession d’évènements – autant de petites histoires qui se lisent avec plaisir quand il ne s’agit pas de sujet ennuyeux. Parmi elles, celle inédite de 1925 en Chine montrait que Hồ Chí Minh savait parfaitement ce qu’ il faisait. Celle sur les partis politiques en 1945 faisait plus qu’ en parler, elle en dressait la liste. Celle du chapitre XI qui concerne le propre père de l’auteur est une révélation. Celle du 30 avril 1975 de Raoul Coutard a forme de symbole : elle marque la fin de l’épopée de la République du Viet Nam.
La guerre d’Indochine était une guerre des Français. La France voulait récupérer l’Indochine perdue aux mains des Japonais en 1945 et en faire des États sous sa tutelle dans le cadre de l’Union Française. Elle faisait cependant partie d’ une toute autre guerre, plus complexe, celle que les Vietnamiens appelaient la guerre d’indépendance. Cette guerre – des Vietnamiens, cette fois ci – hors la période de la guerre d’Indochine, est souvent méconnue. Les colonisateurs la considéraient comme des pillages de bandits ou de pirates qu’il fallait pacifier et ignoraient les multiples revendications qui leur avaient été présentées. L’auteur ne voulait pas qu’on l’oublie, parce qu’elle était une réalité et par devoir de mémoire. Les noms de ces patriotes qui, individuellement ou en groupe, s’étaient levés pour réclamer leur droit d’exister et de se gouverner eux-mêmes, ne peuplent-ils pas les rues des villes du Viet Nam quelqu’en soit le régime ?
L’auteur l’avait-il fait exprès ? Au fur et à mesure qu’on avance dans la lecture de cet ouvrage de 462 pages, on voit se dégager un message. Ho Chi Minh et les communistes n’avaient pas l’exclusivité de l’amour de la patrie. Des Vietnamiens autres qu’eux, de la première guerre cités ci dessus autant que de la seconde, étaient aussi passés par des larmes, du sang et du sacrifice, pour cette même patrie, à leurs manières, suivant leurs propres idéaux. Ils visaient aussi construire pour eux et leurs descendants un futur selon leurs convictions qu’ils espéraient pouvoir durer.
La préface de Pierre Brocheux se dístingue dans ce sens en expliquant « Cette histoire-témoignage étaye, sur plusieurs points, la vision d’un Sud Vietnam réel. Sachons gré à Châu de l’avoir fait » .
L’auteur se devait peut-être d’en parler. Plusieurs membres de sa famille des deux côtés maternel et paternel étaient tombés en combattant les Français dans la première guerre sans être pour autant membre du parti communiste vietnamien. Son père ancien commandant adjoint d’une des trois zones Viet Minh du Sud avait même décliné l’invitation de ce parti de le rejoindre. Et lui-même, était revenu travailler à Sài Gòn où il est né après ses études en France, en pleine seconde guerre.
Cet ouvrage est un livre de références tant les évènements sont exposés avec soin. Il mérite d’être présent dans la bibliothèque de tous ceux qui ont un faible pour ce pays qui a vécu toute cette période troublée.
Paris le 05/11/2020
LKT (Lão Không Tên Không Tử)